Entrée de la télémédecine dans le droit commun en septembre 2018 : une réponse possible aux déserts médicaux ?
< Actualités - Publié le 29 août 2018

Entrée de la télémédecine dans le droit commun en septembre 2018 : une réponse possible aux déserts médicaux ?

Inscrits dans l’article 54 de la Loi de Financement de la Sécurité Sociale 2018, la téléconsultation (consultation par vidéotransmission) et la téléexpertise (avis à distance d’un professionnel à un autre) franchiront un grand cap en septembre 2018 : le passage de l’expérimentation au droit commun.

L’arrêté du 1er août 2018 portant approbation de l’avenant n° 6 à la convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l’assurance maladie concrétise les négociations achevées fin mai et marque un tournant dans le déploiement de la télémédecine en France. Plusieurs mesures phares ont été actées, parmi lesquelles l’ouverture de la téléconsultation à l’ensemble des patients à partir du 15 septembre 2018, après modification de la liste des actes et prestations prévue à l’article 162-1-7 du code de la sécurité sociale et sous réserve de respect du parcours de soins.

Cette généralisation de la télémédecine est l’une des pistes envisagées par le gouvernement pour permettre un meilleur accès aux soins à la population « notamment dans les zones sous denses en offre de soins en permettant aux patients d’obtenir une prise en charge et un suivi plus rapides susceptibles, dans certaines situations, de prévenir certaines hospitalisations et ré-hospitalisations et de diminuer le recours aux urgences ».

Il s’agit d’un enjeu important. En 2017, le délai d’attente pour obtenir un rendez-vous médical chez le médecin généraliste était de 8 jours, et de 117[1] jours pour certains médecins spécialistes (les ophtalmologues notamment). Les déserts médicaux constituent une problématique grandissante : 8% de la population résidait dans une zone sous-dense en 2017[2]. Ils résultent de plusieurs facteurs : démographie vieillissante des médecins, aspirations nouvelles des jeunes diplômés ou encore baisse du nombre de médecins généralistes[3] .

Face à ces constats, la Stratégie Nationale de Santé 2018-2022 inscrit la volonté de généraliser les usages du numérique en santé afin d’abolir les distances[4]. Parmi ces usages, la téléconsultation en particulier pourrait contribuer à réduire les délais d’attente et à lever les freins de distance entre le patient et le médecin, et ainsi améliorer l’accès aux soins dans les déserts médicaux.

Dans quelles conditions la téléconsultation pourra t-elle atteindre ces objectifs ?

 

Les modalités de réalisation d’une téléconsultation ont été définies dans l’avenant 6 à la convention médicale

La connaissance préalable du médecin est requise. Le patient doit avoir bénéficié d’au moins une consultation en présentiel dans les 12 derniers mois. S’agissant de téléconsultations avec un médecin spécialiste, elles supposent un adressage préalable par le médecin traitant conformément au parcours de soin coordonné sauf pour les spécialités en accès direct et les patients âgés de moins de 16 ans.

Néanmoins, deux exceptions ont été prévues : les patients n’ayant pas de médecin traitant désigné ou ceux dont le médecin traitant n’est pas disponible dans un délai compatible avec leur état de santé. Dans ces deux dernières situations, le médecin téléconsultant de premier recours n’a pas nécessairement à être connu du patient. Le recours aux téléconsultations doit être assuré dans le cadre d’une organisation territoriale dans les conditions définies à l’article 28.6.1.2.

Ces cas d’usage pourraient en particulier correspondre à des patients résidant dans un désert médical.

En matière d’équipement, la téléconsultation doit être réalisée par vidéotransmission sécurisée, ce qui implique pour le médecin d’avoir recours à un matériel adapté, comprenant notamment l’accès au dossier de ses patients. Pour cela une aide à l’équipement est intégrée dans le forfait structure. Le lieu de réalisation de la téléconsultation doit également permettre la confidentialité des échanges entre le patient et le médecin consultant.

En ce qui concerne les tarifs de ces téléconsultations remboursées par l’assurance maladie, l’avenant fixe un tarif de 25 euros pour une consultation avec un généraliste et de 30 euros pour une consultation avec un spécialiste. Les médecins conventionnés, relevant du secteur 2, sont autorisés à pratiquer des dépassements d’honoraires.

 

Quelles sont les conditions à remplir pour que la téléconsultation constitue une réponse aux déserts médicaux ?

Pour que la téléconsultation puisse constituer une véritable solution, plusieurs conditions doivent être réunies dans les deux cas d’exception au respect du parcours de soin.

Tout d’abord, l’accès à la téléconsultation nécessitera l’organisation locale d’une réponse en télémédecine de manière coordonnée et ouverte à tous les professionnels de santé du territoire. La commission paritaire locale (CPL) ou régionale (CPR) doit valider cette organisation afin de vérifier son adéquation à l’organisation territoriale souhaitée par les partenaires conventionnels pour la télémédecine.

Les Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS)

→      Issues de la Loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016.
→      Emanent des professionnels de santé et en particulier des professionnels de santé de ville souhaitant porter des projets pour améliorer l’offre de soins et la prise en charge d’une population

 

Environ 200 CPTS sont aujourd’hui recensées en France

En effet, en cas d’indisponibilité du médecin traitant, le recours à la téléconsultation devra être réalisé dans le respect de règles d’orientation définies localement vers les autres médecins, généralistes et spécialistes, proposant la télémédecine. Ces organisations peuvent être des Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS), des Equipes de Soins Primaires (ESP), des Maisons de Santé Pluriprofessionnelles (MSP), ou encore des centres de santé (CDS). Les partenaires conventionnels se sont ainsi engagés à accompagner la mise en place des organisations et à les promouvoir.

D’autre part, au-delà du respect de ces organisations territoriales, le recours à la téléconsultation ne pourra pas se faire sans une bonne gestion du temps médical, dans un contexte où ce temps est particulièrement restreint. La capacité d’organisation de l’emploi du temps des professionnels, notamment à l’aide d’outils technologiques adaptés, constituera un levier de réussite central dans le développement de la téléconsultation.

Enfin, la démocratisation des usages impliquera d’importants efforts d’accompagnement et de formation des médecins tant la rupture dans les pratiques s’annonce importante. En effet, la réalisation d’une téléconsultation et la prise en main des outils dédiés devront s’intégrer progressivement dans les pratiques des professionnels de santé. Les solutions devront pouvoir couvrir une grande diversité de cas d’usage selon les souhaits et motivations des médecins. En outre, les patients pourraient aussi être amenés à jouer un rôle dans la qualité et la facilité d’utilisation des services de mise en relation choisis par les médecins.

 

Regard d’expert ByProxicare

Généraliser les usages du numérique en santé pour abolir les distances est l’une des grandes thématiques du gouvernement pour les années à venir et témoigne des perspectives de généralisation de la télémédecine dans le temps.
La coordination des acteurs territoriaux et la formation à ces nouvelles pratiques sont deux piliers majeurs de la mise en place de la télémédecine. PROXICARE se tient à vos côtés pour vous accompagner dans vos projets de développement des usages et des pratiques, en fonction des organisations territoriales, des besoins des professionnels de santé et attentes des patients.

 

[1] Observatoire de l’accès aux soins, Ifop, mars 2017.

[2]Les Dossiers de la Drees, N°17, Mai 2017

[3]Les Dossiers de la Drees, N°17, Mai 2017.

[4]Stratégie Nationale de Santé, 2018-2022.

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